Entré à la sous-préfecture de Pontarlier en 1987, Hervé Humbert ne se contente pas de conduire son patron un peu partout sur l’arrondissement voire le département. Ce très bon bricoleur assure aussi une bonne partie de l’entretien de la résidence où vivent le sous-préfet et sa famille. Chauffeur, menuisier, électricien, jardinier voire serveur si besoin, cet employé polyvalent vient de recevoir à juste titre la médaille de bronze de l’administration territoriale de l’État.

Avec son C.A.P. d’électricien, il aurait pu travailler dans le bâtiment. Ce qu’il a fait pendant quelques années en sortant de sa formation et qui lui a permis d’acquérir de l’expérience dans le bricolage. Sa carrière dans l’administration, il la doit en partie à sa maman Nicole qui travaillait également en sous-préfecture.

En 37 ans de carrière, Hervé Humbert a conduit neuf voitures de fonction, toutes des Peugeot, avec lesquelles il a parcouru 1 million de kilomètres sans le moindre accident ou excès de vitesse.

« Les familles du personnel étaient parfois conviées à des repas. Un jour où j’accompagnais ma mère dans une de ces rencontres, le sous-préfet M. Petitjean m’a informé qu’il recherchait un chauffeur qui puisse aussi faire des travaux d’entretien. Je venais tout juste de finir mon service militaire et j’étais disponible. Du coup, j’ai accepté et je suis venu m’installer dans un logement à la sous-préfecture », explique celui qui a été recruté le 16 mars 1987.

Toujours fidèle au poste, il a vu passer pas mal de monde depuis 37 ans : 16 sous-préfets, 6 secrétaires généraux, 40 collègues partis en retraite ou mutés. Au cours de sa carrière, il a conduit neuf véhicules de fonction. Toutes des Peugeot avec lesquelles il a quand même parcouru 1 million de kilomètres, soit 25 fois le tour du monde !

Hervé Humbert a reçu des mains du préfet du Doubs Rémi Bastille la médaille de l’administration territoriale de l’État. “Pour moi c’est une belle reconnaissance pour tous les membres du personnel qui travaillent à la sous-préfecture

« Le nombre de sorties varie d’un sous-préfet à l’autre. Certains n’avaient pas le permis, d’autres apprécient beaucoup d’être sur le terrain. Les déplacements professionnels sont assez fréquents sur un territoire qui s’étend du Russey à Chapelle-des-Bois. Pour nous chauffeurs, il y a toujours beaucoup d’attente mais on s’y habitue. Je ne me plains jamais de ce que je fais. Au fil des ans et des déplacements, on tisse un bon réseau de connaissances. »

En 37 ans, le chauffeur du sous-préfet de Pontarlier n’a jamais été impliqué dans un accident ni été pris au radar. Ce qui ne l’a pas empêché de faire une pointe à 230 km/h sur l’A36. « C’était lors d’une visite officielle du président Sarkozy à Montbéliard. C’est tout le cortège qui roulait à grande vitesse en sachant qu’on était encadré par une myriade de motards pour sécuriser ce type de déplacements. »

En dehors des ministres et secrétaires d’État de passage dans le Haut-Doubs, Hervé Humbert a croisé aussi quelques personnalités comme Jean-Loup Chrétien, le premier spationaute français qu’il était allé chercher à l’aéroport de Genève. Pour l’anecdote, il a aussi assisté à une sympathique prise d’otage d’un sous-préfet par les agriculteurs locaux qui avait retenu le haut fonctionnaire en question dans une ferme le temps de faire passer leurs revendications.

« C'était plus symbolique qu’autre chose. Après quelques échanges avec la Préfecture, tout s’est achevé autour d’une collation. » Des anecdotes, il en a accumulé quelques-unes. C’est lui par exemple qui avait dû veiller à la bonne santé des ânes enlevés par les agriculteurs au député Roland Vuillaume pour les acheminer devant la sous-préfecture. « Ils les avaient attachés à la grille côté rue de la République. Ils sont restés sur place toute une nuit avant d’être restitués au député. »

Autre clin d’œil, lors de la visite du président François Mitterrand au château de Joux en 1987. Faute d’avoir un costume officiel, Hervé Humbert avait utilisé son costume de mariage pour faire bonne figure. « J’ai toujours le costume mais je ne peux plus le mettre car il a rétréci ! », sourit-il.

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De ses rapports avec les sous-préfets côtoyés au fil de sa carrière, il a parfois noué de très bons contacts qui sont toujours actifs ou inversement s’est contenté de simples relations de travail sans plus. L’ambiance qui règne à la sous-préfecture contribue aussi à sa longévité dans la fonction. « Ici, on est une petite famille où il fait bon travailler. »

Quand il n’est pas au volant, il trouve toujours à s’occuper dans les travaux d’entretien de la résidence, ou la gestion du jardin. Quand Nicolas Onimus, l’actuel sous-préfet, a souhaité que la sous-préfecture s’engage plus activement dans la valorisation des déchets, c’est lui qui s’est chargé au printemps dernier de construire le poulailler au fond du beau parc attenant à la résidence. Six poules occupent désormais les lieux. « On valorise les déchets culinaires de la résidence ainsi que ceux d’une partie du personnel. On a même établi un planning de distribution des œufs. »

Début septembre, Rémi Bastille, le préfet du Doubs, est venu lui remettre la médaille de l’administration territoriale de l’État, échelon bronze. Le haut fonctionnaire est reparti avec sa boîte d’œufs pondus à Pontarlier.

Hervé Humbert, père de trois enfants et aujourd’hui cinq fois grand-père, finira sans doute son parcours professionnel à la sous-préfecture. Un choix parfaitement assumé pour celui qui fut aussi un sportif accompli en ski, vélo, footing, sans oublier pilote à l’aéroclub de Pontarlier avant de devoir lever le pied pour des raisons de santé.