La commission patrimoine de la M.J.C. de Villers-le-Lac célèbre l’événement en organisant une grande exposition du 7 au 15 octobre à la salle de la Pastourelle. Photos inédites, maquette, film d’époque et conférence.
Un projet imaginé dès 1895
“On a retrouvé aux archives du canton de Neuchâtel, des documents évoquant déjà un projet de barrage en 1895”, souligne Thierry Munier de la commission patrimoine de la M.J.C. Le projet se concrétisera quelques décennies plus tard dans le contexte énergétique de l’après-guerre marqué par la nécessité de répondre à l'évolution des besoins industriels et domestiques.
Un barrage franco-suisse pour exploiter le potentiel hydroélectrique
Les montagnes jurassiennes n’échappent pas à cette réalité qui incite à exploiter davantage le potentiel hydroélectrique local et notamment celui de la sauvage et encaissée vallée du Doubs marquant la frontière entre la Suisse et la France au-delà de Villers-le-Lac. Cela aboutit à un bel exemple de coopération entre les deux pays avec la mise en place de deux consortiums pour procéder à la construction du barrage du Châtelot de l’usine du Torret à partir de 1950.
Un chantier colossal mobilisant des milliers d'ouvriers
Le chantier est colossal. Il va mobiliser des milliers d’ouvriers dont beaucoup d’Italiens. “On sait que 1 200 hommes ont participé à la construction de la centrale du Torret”, poursuit Thierry Munier. À défaut de trouver sur place les matériaux adéquats qui fourniront les assises de l’ouvrage, une énorme carrière est ouverte à 45 km de là dans la colline de Mamirolle où seront extraits 50 000 m3 de roche compacte et résistante aux effets du gel. Les éléments seront acheminés en train jusqu’à la gare de Villers puis par camion.
Des dimensions impressionnantes
Les dimensions de ce barrage-voûte sont imposantes. Son mur fait 14 m d’épaisseur à la base et 2 mètres au couronnement. Haut de 74 mètres, l’ouvrage retient environ 20 millions de m3 d’eau qui ont recouvert les hameaux du Moron, des Graviers et de l’Enfer. L’eau est acheminée à la centrale du Torret par une galerie d’amenée de 3 km creusée dans la roche puis par une conduite forcée de 141 mètres créant un dénivelé de 67 m avant d’être turbinée par quatre turbines permettant d’engendrer 100 GWh électriques annuels, soit la consommation d’environ 22 000 ménages.
Une gestion désormais à distance
Depuis 2006, un petit groupe de production a par ailleurs été installé au pied du barrage afin de turbiner le débit de restitution de 2 m3 par seconde. Il permet de générer plus de 6 GWh annuels. L’ouvrage appartient à la Société des Forces Motrices du Châtelot détenus par des actionnaires suisses et français répartis paritairement. La gestion technique, administrative, son exploitation ainsi que l’entretien des rives sont assurés par le Groupe E, producteur et distributeur d’électricité dans les cantons de Fribourg, de Neuchâtel et de Vaud.
En 1953, 15 ouvriers veillaient au bon fonctionnement de la centrale du Torret. Ils travaillaient en 3 x 8 et habitaient sur place. Aujourd’hui, tout est géré à distance depuis le centre de conduite basé à Fribourg. L’accès à l’usine se fait toujours par le biais d’un funiculaire au départ du hameau des Planchettes. Des négociations sont en cours entre la France et la Suisse pour le renouvellement de la concession d’exploitation accordée jusqu’en 2028 à la Société des Forces Motrices du Châtelot.