La Banque de France a dressé le panorama 2023-2024 d’une économie régionale plombée par une conjoncture plutôt morose. Mais tout n’est pas noir dans ce tableau
C’était un peu le baptême du feu pour Laurent Quinet, le nouveau directeur départemental de la Banque de France à Besançon. Un exercice d’équilibriste cette présentation des performances 2023 des entreprises de la région et des tendances de l’économie pour les mois à venir, entre bonnes et moins bonnes nouvelles.
Les bonnes nouvelles, c’est d’abord que “les entreprises franc-comtoises sont résilientes alors que le contexte est chargé d’incertitudes avec une croissance qui s’est nettement ralentie” commente Laurent Quinet. La mauvaise nouvelle, la voilà, c’est une croissance du chiffre d’affaires de nombreuses entreprises en nette baisse l’an dernier : -6,5 % pour les activités liées aux services aux entreprises, -10,5 % pour les services aux particuliers, et -12,5 % dans l’industrie par rapport à l’année précédente. “Deux entreprises sur cinq, soit 37 %, ont connu une baisse de leur chiffre d’affaires” confirme le directeur de la Banque de France. En volume de production, c’est près de 50 % des entreprises qui ont été confrontées à une baisse.
Concernant les perspectives, l’institution bancaire régionale a récemment interrogé plus de 500 dirigeants d’entreprise : une majorité d’entre eux n’entrevoient pas d’augmentation de leur chiffre d’affaires sur l’année en cours. Pire : 44 % des entreprises industrielles et 42 % des prestataires de services aux entreprises anticipent une baisse de leur chiffre. Et même “une entreprise sur dix dans la construction et l’industrie prévoit une très forte baisse de son chiffre d’affaires.” “Les difficultés de l’horlogerie suisse actuellement, liées à une forte baisse de son marché à l’export vers la Chine, impactent de nombreux sous-traitants locaux” ajoute M. Quinet. Sachant que 15 % du chiffre d’affaires des entreprises de la région est réalisé à l’export.
Du côté des marges, ce sont les entreprises de prestations de services qui s’en sont le mieux tirées sur l’exercice précédent avec un taux de marge brute d’exploitation situé à 6,3 % pour les services aux entreprises, et de 14,5 % pour les services aux particuliers. “Mais on a constaté un vrai effritement des marges l’an dernier” complète Laurent Quinet. Une érosion des marges qui touche principalement les P.M.E., les marges des grandes entreprises de construction ou dans l’industrie résistant mieux.
Dans le contexte de hausse des taux d’intérêt constatés depuis deux ans, les charges financières des entreprises ont doublé en 2023. Les charges d’intérêts absorbent ainsi 0,75 % du chiffre d’affaires contre 0,42 % l’année précédente. “Avant de commencer à baisser un peu cette année, les taux avaient subi 11 hausses consécutives jusqu’à atteindre quasiment 4,5 %. Les conséquences se sont bien fait sentir. Dans un contexte où les entreprises ont commencé à rembourser leur P.G.E. et où par conséquent leur trésorerie s’effritait.”
Dans ce contexte difficile, l’investissement s’est pourtant maintenu à un bon niveau. “Mais pour 2024 et les mois qui viennent, les chefs d’entreprise prévoient un vrai stop” tempère le directeur de la Banque de France. Pour la fin de l’année 2024, léger rayon de soleil dans les prévisions des entreprises de la région : deux tiers d’entre elles n’anticipent pas de dégradation de leur rentabilité, un quart d’entre elles prévoyant même une amélioration.
Les défaillances d’entreprises, elles, continuent à progresser après une pause pendant les années Covid liée aux aides de l’État : leur nombre a doublé depuis 2021. Mais relativisons : ces défaillances ne sont “que” 10 % plus nombreuses qu’en 2019 avant la crise sanitaire. Sur la dernière année, 380 entreprises du Doubs ont connu une procédure de redressement ou de liquidation.