Faudra-t-il qu’il y ait un drame pour faire bouger les choses ? C’est la question que se posent plusieurs commerçants du centre-ville bisontin qui ont lancé une pétition, face à la hausse des agressions et des dépôts de plainte envers les sans-abri.
Insultes, crachats, menaces, odeur d’urine… La situation autour de la mendicité n’est pas nouvelle mais à tendance à s’aggraver dans la Boucle, d’avis de commerçants. “On va bientôt passer plus de temps à résoudre les problèmes générés par les personnes alcoolisées, droguées et/ou atteintes de troubles psychologiques, qu’à gérer nos magasins.”
Le gérant du Carrefour Express de la Grande rue, qui en est déjà à trois dépôts de plaintes depuis un an, estime qu’il est “urgent de trouver des solutions.” Sa dernière intervention de médiation ayant fini sous la menace probable d’un couteau. “J’étais en train de demander à la personne de ne pas rester en devanture. Elle était déjà très alcoolisée et m’a dit qu’elle n’hésiterait pas à se servir de son couteau, en portant la main à sa veste. J’ai demandé à mes employés de rentrer et nous avons appelé la police. En général, les menaces restent verbales mais dans ce cas présent, cela aurait pu mal tourner.”
Ce commerçant en vient à craindre pour la sécurité de ses clients et de son équipe. “Beaucoup de mes salariés habitent au centre-ville et ont peur d’être attendus et suivis à la sortie. Ce sont des situations qu’ils connaissent bien pour les vivre aussi autour de chez eux.”
Les réunions organisées avec la mairie et l’Union des commerçants, notamment celle du 6 décembre dernier à ce sujet, ne semblent pas apaiser les choses. “On voit davantage passer la police municipale, mais ils n’interviennent pas pour autant, sauf en cas d’atteinte avérée à la tranquillité publique.”
Pour ne pas laisser s’envenimer la situation, il a décidé de lancer une pétition avec la commerçante voisine, d’Iris Galerie, qui a aussi essuyé dernièrement des tags et insultes à caractère sexiste sur sa vitrine, par mesure de représailles. “On se sent en danger. On ne peut rien dire, rien faire, sans être pris à partie derrière. Ce qui fait que beaucoup ne réagissent plus. Ce n’est pas normal”, estime-t-elle. Son local, resté vacant pendant longtemps et légèrement en recul de la voirie, voyait son pas-de-porte régulièrement occupé avant son arrivée. “Ils avaient l’habitude de dormir là. Et quand on leur explique qu’ils n’ont rien à y faire, ils nous répondent qu’ils font ce qu’ils veulent parce qu’ils sont sur l’espace public !”
Une attitude qui a le don d’agacer les commerçants. “Il est inadmissible pour nous de payer une redevance d’occupation de plusieurs centaines d’euros par an, alors que des fauteurs de troubles utilisent cet espace illégalement pour racketter, s’alcooliser, agresser et harceler les habitants.”
Leur pétition recense une quarantaine de signataires. Tous réclament des actions plus efficaces dont l’application, en premier lieu, de l’arrêté municipal sur la circulation dans l’espace public (qui interdit notamment toutes occupations abusives et prolongées des rues ou le regroupement de plus de deux chiens). Mais aussi l’ouverture de davantage de solutions d’accueil de jour, avec des associations de sans-abri, ou la mise en place d’un document de plainte simplifiée pour les vols à l’étalage.
“C’est de pire en pire ces derniers temps, sans doute avec le déplacement des populations marginalisées dans le cadre des Jeux olympiques. Et ça va encore s’aggraver avec l’arrivée de la belle saison. Cela joue en grande partie dans la perte d’attractivité du centre-ville”, estiment ces lanceurs d’alerte.