Début mai, le ministre du Logement Guillaume Kasbarian a présenté un projet de réforme du logement social. Parmi les points saillants, la chasse aux locataires les plus fortunés, donner plus de pouvoir aux maires dans les attributions, changer les règles de calcul des quotas

Alors que la crise du logement s’intensifie toujours plus, les chiffres restent vertigineux et alarmants. Au niveau national, 4,2 millions de personnes sont mal logées. Selon l’Union sociale pour l’habitat, 2,6 millions de ménages sont en attente d’un logement social, un “chiffre en hausse de 7,5 %.” C’est donc dans une volonté d’apporter des réponses à la crise du logement qu’émerge le projet de réforme du logement social du gouvernement. Ce dernier vise le développement de l’offre de logements abordables. “Intégration des logements intermédiaires dans la loi S.R.U., durcissement des surloyers en H.L.M., nouveaux pouvoirs conférés aux maires dans l’attribution des logements sociaux…”, résume ainsi viepublique.fr les trois points principaux du projet.

Bailleurs sociaux comme associations de défense des locataires sont vent debout à Besançon contre le projet de réforme du logement social qui sera débattue au Parlement mi-juin. Ils sont tous unanimes pour pointer une autre priorité que de faire la chasse aux soi-disant abus : la construction de nouveaux logements sociaux dont le nombre s’est effondré.

H.L.M. : la Chasse aux Locataires les Plus Riches

C’est sans conteste l’un des points de la réforme qui fait le plus réagir. Dans un objectif de “renforcement de mobilité résidentielle”, le gouvernement prévoit une révision des plafonds de ressources. Notamment en abaissant le seuil de ressources pouvant déclencher l’expulsion d’un ménage de son logement social. Au-delà de ce seuil, les locataires devront payer un complément de loyer. La réforme souhaite aussi prendre en compte le patrimoine des locataires, qui leur permettrait de se loger en dehors du parc social. Ainsi, le niveau de ressources susceptible d’expulsion passerait de 50 % à 20 % au-dessus du plafond de ressources. Les ménages qui ont vu leurs revenus augmenter depuis l’attribution de leur logement social représenteraient 8 % des locataires selon le ministre du Logement. “Nous souhaitons que les bailleurs vérifient que ceux qui sont actuellement dans le parc de logements sociaux restent bien légitimes à y rester”, a expliqué Guillaume Kasbarian pour qui “le logement social à vie n'existe pas.” Ce dernier s’est, par ailleurs, déclaré “ouvert” à l’idée de “renforcer” les possibilités d’expulser des logements sociaux les familles de personnes qui “font de la délinquance, notamment les enfants”, souligne le site Maire-info.com. Le site d’information dédié aux élus relève par ailleurs un changement pour les bailleurs sociaux : “Les bailleurs sociaux pourraient, pour leur part, doubler leur production de logements intermédiaires, à hauteur de 20 % de leur parc de logements locatifs sociaux (contre 10 % aujourd’hui), mais aussi augmenter plus rapidement le loyer d’un logement social lorsqu'il y a un changement de locataire. Ils pourraient en outre vendre jusqu’à 50 % de leur production de logements à des investisseurs ou à des particuliers.”

À Besançon, plus de 30 000 personnes habitent un logement social.

Intégration des Logements Intermédiaires

La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain de 2000 dite S.R.U. a pour objectif de “rééquilibrer l’offre de logement social et abordable sur l’ensemble du territoire, en favorisant une répartition équilibrée du parc social, garante de la mixité sociale et de la solidarité territoriale”, selon le gouvernement. Avec la réforme, cette loi devrait intégrer les logements intermédiaires afin que les communes déficitaires en logements sociaux rattrapent leur retard. Concrètement, dans “ces communes en deçà des quotas (20 ou 25 % de logements sociaux), les maires qui décideraient de s’engager dans un contrat de mixité sociale” avec l’État pourraient intégrer des logements intermédiaires (L.L.I.) dans les objectifs de production fixés par la loi S.R.U. Cette mesure ne s’appliquerait, toutefois, qu’aux communes qui comptent déjà plus de 15 % de logements sociaux (ou 10 % si leur objectif est de 20 %).

À Besançon, plus de 30 000 personnes habitent un logement social.

Parmi les 1 161 communes déficitaires, 656 communes pourraient bénéficier de la mesure dès son entrée en vigueur, et 271 pourraient “en bénéficier à court terme”, détaille l’étude d’impact annexée au projet de loi. Selon l’A.M.F., ce serait plutôt “une quarantaine de communes maximum qui seraient potentiellement concernées”, éclaire ainsi le site Maire-info.

Plus de Pouvoir aux Maires

En outre, la réforme donne plus de pouvoir d’attribution aux maires. Ils pourront décider qui pourra emménager et auront un droit de veto. “Les cinq principales associations de locataires H.L.M. craignent un “clientélisme électoral voire une préférence nationale” et fustigent plus globalement “un projet de loi qui fait la chasse aux pauvres”, relève ainsi francebleu.fr.

La Fondation Abbé Pierre partage cette opinion et regrette que “la question de l’habitat continue à être traitée par l’exécutif avant tout à travers le prisme budgétaire au détriment de la dimension sociale.”

Le projet de loi sera examiné à partir du 17 juin par le Sénat, puis par l’Assemblée nationale à l’automne.


Cet article vous est proposé par la rédaction de La Presse Bisontine
Abonnez-vous en ligne en quelques clics
Abonnement La Presse Bisontine