Engagés depuis 2015, les travaux de modernisation de la ligne des Horlogers terminent la seconde phase. La circulation doit reprendre le 1er novembre. Avec près de 110 millions d’euros investis, la ligne des Horlogers est sauvée après plus de 50 ans de combats.
La ligne des Horlogers est - enfin - sauvée
Après plus de huit mois de travaux, la circulation des trains sur la ligne des Horlogers doit reprendre dès le 1er novembre. Soucieuse de montrer qu’elle est à l’heure sur les travaux, la S.N.C.F. a ouvert ses coulisses pour expliquer les changements réalisés
C’est non sans plaisir et fierté que Maxime Chatard, directeur territorial de SNCF Réseau B.F.C., et Michel Neugnot, vice-président de la Région dédié à la mobilité, ont fait cette annonce : la ligne des Horlogers est sauvée.
Si la SNCF et la Région se posent aujourd’hui en sauveuses de cette liaison ferroviaire internationale, reliant Besançon à La Chaux-de-Fonds, d’autres nuancent le propos. Benoît Vuillemin, maire de Saône, souligne que cette ligne a été sauvée grâce au combat des élus de plateau. Pour Jean-Claude Roy, militant FNAUT et ancien chef de gare à Morteau il y a 50 ans, ce sont les organisations syndicales qui ont sauvé la partie Valdahon-Morteau de la ligne.
Quoi qu’il en soit, après huit mois de travaux de modernisation et 53,5 millions d’euros investis pour cette phase de travaux, la ligne des Horlogers retrouve sa splendeur et ses trains dès le 1er novembre. « Le planning est tenu, tient à souligner d’emblée Maxime Chatard. On a fait ce qui était nécessaire, dont la réalisation des travaux en fermeture de ligne. »
La ligne des Horlogers, datant de la fin du XIXe siècle, accusait une vétusté et une vulnérabilité face aux changements climatiques. Les agressions climatiques ont amené à un vieillissement prématuré de cette ligne de montagne. Sinueuse, elle devait se moderniser pour pallier la perte de qualité qui posait des difficultés.
Cette seconde phase de travaux, qui se termine fin octobre, concerne 22 km (sur les 40 km restant à moderniser) de renouvellement de voie. L’objectif étant de pérenniser et optimiser la circulation, améliorer le confort des usagers et enfin de rendre accessibles les gares de la Mouillère à Besançon et de Saône vers Besançon. Parmi les nombreux travaux réalisés, six tunnels ont été modernisés et mis aux normes. Le pont-rail du Diable à Remonot a été renouvelé. Le pont de la Tanche a, quant à lui, nécessité d’importants travaux pour remplacer le tablier métallique (voir plus loin) tandis que les maçonneries ont été réparées sur le viaduc de Malpas entre Villers-le-Lac et la frontière suisse. Le passage à niveau d’Avoudrey (n° 28) a été automatisé. Par ailleurs, SNCF Réseau a pris en charge l’entretien et la modernisation de 6 ponts-routes : 2 à Étalans, 2 à Longemaison, 1 à Orchamps-Vennes et 1 à Gilley. Entre Morteau et Le Locle, tout le réseau de transmission a été rénové avec la fibre optique.
Globalement, ce grand chantier a nécessité le travail de plus de 75 personnes par jour, 28 entreprises intervenantes, et 13 600 heures d’insertion prévues sur le chantier. La ligne des Horlogers, longue de 75 km, compte 48 passages à niveau, 42 ponts ferroviaires et 12 tunnels. 31 TER circulent quotidiennement dont 15 circulations entre la France et la Suisse.
Une première phase de travaux en 2021 (56,2 millions d’euros) avait déjà permis la rénovation de la moitié du linéaire, soit 35 km. Des ouvrages ont été confortés et rénovés, les gares de Morteau et Valdahon ont été mises en accessibilité, la signalisation a été modernisée pour correspondre à celle des Suisses. La gestion différente du ferroviaire entre la France et la Suisse a par ailleurs été soulevée par Michel Neugnot. « C’est une ligne internationale financée uniquement par la Région. Nous négocions régulièrement avec les Suisses. Mais la jointure entre les deux pays peut générer de grosses difficultés. » À titre d’exemple, si un train a deux minutes de retard, causé par une qualité de réseau détériorée, cela engendre un bazar côté suisse, l’usager ratant sa correspondance.
La ligne des Horlogers véhicule 2 000 passagers par jour (80 000 sur l’ensemble de la Région), les deux tiers faisant Besançon-Valdahon, quand le reste va jusqu’en Suisse. Il faut d’ailleurs noter une baisse de 10 % des passagers faisant la liaison de bout en bout. Pour autant, la capacité des rames a augmenté lors de cette première phase de travaux en 2021, passant de 80 à 160 places selon le nombre de rames.
Si près de 110 millions d’euros investis par la Région, l’État et SNCF Réseau ont permis de sauver ce train historique, et de retrouver la vitesse initiale de 95 km/h, tout n’est pas terminé. Or, comme le souligne Michel Neugnot, il « faut réfléchir aux financements possibles, mais on est obligés de réagir par rapport à la réalité. » La réalité étant un goulot d’étranglement de l’argent public. Reste que l’élu régional a tenu à rappeler que « sans la Région, la ligne des Horlogers aurait fermé. Ce sont des choix politiques menés par Marie-Guite Dufay, cela peut sembler évident mais pas acquis du tout. Mesurons notre bonheur d’avoir trouvé la capacité de financement de plus de 100 millions d’euros. Nous ne sommes pas forcément au bout mais les financements ne se trouvent pas facilement. »
Michel Neugnot ne manquant pas de souligner que la ligne des Horlogers a fait des envieux et donné de l’appétit aux autres. « À chaque fois qu’on parle de chemin de fer, c’est un chemin de croix. J’ai dix chemins de croix, dix points névralgiques, comme la ligne des Hirondelles. Et en plus, ça s’accélère. Il faudra faire des choix. Nous sommes devant ce mur d’investissement. On ne pourra pas faire partout, plus, et mieux. »
Au niveau de la Bourgogne-Franche-Comté, le chiffre d’investissement nécessaire au bon fonctionnement du réseau est estimé à 140 millions d’euros. « Cette estimation va s’accélérer », note Michel Neugnot. Il cite l’exemple de l’Italie qui a amélioré son réseau ferroviaire grâce aux deniers de l’État. « Je ne sais pas si l’État est en capacité de financer plus, je pose la question », observe-t-il tout en mentionnant l’Europe également.
La question du ferroviaire, et de son financement, revêt un enjeu majeur à l’avenir, d’autant que ce secteur génère 0,3 % d’émissions de gaz à effet de serre contre 30 % pour le secteur des transports dans sa globalité.
Le pont de la Tanche, l’un des ouvrages les plus compliqués à rénover
Petit par la taille mais grand par la complexité. Lors de la présentation des travaux de la ligne des Horlogers qui devraient se terminer fin octobre, David Molaro, chef de projet S.N.C.F. Réseau n’a pas manqué de relever la singularité du pont ferroviaire de la Tanche. Situé à la sortie de Morteau, direction Villers-le-Lac, il a été remplacé par un ouvrage plus solide. Il a fallu déposer puis reposer la voie. Les fondations ont été refaites. Un nouveau tablier métallique d’une ouverture de 8 mètres, (contre cinq mètres pour l’ancien) a été installé. Les travaux ont duré de mi-avril à mi-septembre.