Dans le Doubs, comme partout ailleurs, l’urbanisation n’a eu de cesse de grignoter en priorité du foncier agricole, ce qui ne manque pas d’irriter les exploitants particulièrement remontés sur l’absence de compensations sur le domaine forestier.
Les chiffres sont implacables : en un siècle, la Surface Agricole Utile (S.A.U.) dans le Doubs a diminué de 30 %, passant de 317 000 hectares à 222 000 hectares. “Sur les 95 000 hectares de S.A.U. perdus, 25 000 hectares ont été urbanisés et 70 000 correspondent à l’avancée de la forêt. À l’échelle nationale, on perd l’équivalent d’un département tous les quatre ans”, résume Florent Dornier, président de la F.D.S.E.A. du Doubs. À ce titre, il siège à la Commission de Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers. Cette instance, plus connue sous le sigle C.D.P.E.N.A.F., est un des outils de la stratégie de lutte contre l’artificialisation des terres agricoles. Le responsable syndical estime, a contrario, que l’urbanisation sur l’espace agricole va à l’encontre des orientations politiques, arguant d’une recherche de souveraineté alimentaire devenue une priorité nationale suite au conflit entre la Russie et l’Ukraine. Il pointe aussi du doigt la volonté d’encourager le développement des énergies renouvelables en favorisant l’implantation de fermes photovoltaïques sur des terres agricoles.
“Il faut savoir que dans le Doubs, un mètre carré sur deux de la surface non bâtie est occupé par de la forêt. Depuis plusieurs années, le scolyte cause d’importants dégâts sur les forêts en libérant des espaces qui pourraient être rendus à l’agriculture ou servir à des projets d’urbanisation. Cela aurait du sens.” Cette option est également soutenue par Daniel Perrin, le président des communes forestières du Doubs. “On n’est pas opposé à ce que des terrains plantés entre 1960 et 1980 retournent à l’agriculture. S’il y a des opportunités avec le scolyte, on n’a pas d’état d’âme. Signalons quand même que tout ce qui est soumis au régime forestier restera forestier. C’est impossible de déclasser une forêt soumise”, explique Daniel Perrin en rappelant aussi que le monde agricole avait largement profité du Fonds Forestier National créé après-guerre pour encourager le reboisement. Les vérités d’hier...
Florent Dornier n’en démord pas. “Dans les P.L.U., les compensations foncières sont rarement au rendez-vous. Quand un droit de préemption est exercé sur une exploitation, ce n’est pas pour constituer de la réserve foncière.” Le monde agricole applaudit le Z.A.N. qui a provoqué une vraie prise de conscience en marquant une rupture dans l’urbanisation galopante. “On est loin de faire de l’opposition systématique. 98 % des dossiers examinés en C.D.P.E.N.A.F. passent à l’unanimité. C’est vrai qu’on dénonce la mise en cloche de la forêt. On sait aujourd’hui qu’une forêt en dépérissement va capter moins de carbone qu’une prairie. L’argument écologique ne joue pas toujours. La F.D.S.E.A. n’est pas là pour bloquer les projets, mais l’agriculture ne doit pas être la seule variable d’ajustement foncier.”