La Confédération paysanne Bourgogne- Franche-Comté avec interbio Franche- Comté, grâce au financement de la Région, a lancé en 2020 l’étude Clim’a.o.P. qui mesure, compare les émissions de gaz à effet de serre sur 46 fermes situées dans les zones a.o.P. comté. Résultats.
Quelle stratégie mettre en place pour s’adapter au changement climatique en cherchant à atténuer les émissions carbonées tout en restant économiquement viable ? C’est l’objet même de cette étude. “On s’est servi de notre réseau pour mobiliser 46 fermes en agriculture paysanne ou bio. Cette étude comporte un volet technique et un chapitre sociologique. On a utilisé l’application CAP’2ER. C’est un outil qui permet de mesurer les impacts environnementaux, résultant des activités de production, par atelier au sein de l’exploitation. On regarde ce que les fermes émettent et ce qu’elles stockent en CO2. On a trouvé des fermes très proches de la neutralité carbone, ce qui permet d’identifier les leviers expliquant ces faibles émissions”, résume Nicolas Lecatre, secrétaire de la Confédération paysanne du Doubs.
La prairie permanente apparaît comme l’une des solutions les plus efficaces pour réduire l’empreinte carbone des exploitations agricoles. Autre levier : réduire l’utilisation d’engrais minéraux. Conçus à partir de fioul et de gaz, ils sont également très lessivables avec le risque induit sur la qualité de l’eau et de l’air. L’azote excédentaire qui n’est pas capté par la plante se retrouve dans l’eau sous forme de protoxyde d’azote qui est un puissant gaz à effet de serre, ou dans l’eau sous forme de nitrates. “La filière comté limite déjà les quantités d’azote à épandre par hectare et nous espérons que les orientations définies en la matière dans le futur cahier des charges aboutissent”, explique Laurence Lyonnais, porte-parole de la Confédération paysanne du Doubs.
Moins d’engrais azotés cela signifie aussi moins de risques de pollution en nitrates dans les rivières comtoises. Les fermes qui arrivent à atteindre un bas niveau de carbone sont également celles qui utilisent le moins de tourteaux protéiques non O.G.M. Leur production concentre les gaz à effet de serre, ce qui déséquilibre le bilan carbone sur une ferme A.O.P. Quand ces concentrés sont distribués en trop forte quantité, ils se retrouvent dans les déjections animales. Cela représente aussi une perte économique sur l’exploitation. “La limitation à 1 800 kg par vache et par an de concentrés est une base du cahier des charges du comté qu’il faut utiliser pour aller plus loin dans cette réduction d’apports protéiques sources de G.E.S. et d’azote.”
Aussi pertinents soient-ils, ces leviers impliquent souvent des changements de pratiques pas toujours faciles à accepter, car cela remet en cause des habitudes de travail. Clim’A.O.P. prend en compte cette dimension humaine en intégrant un volet sociologique. “Cela permet d’identifier les freins à lever. On se confronte à des difficultés culturelles qui nécessitent un accompagnement qui n’est pas que technique. La démarche implique aussi de faire changer les mentalités”, poursuit Laurence Lyonnais.
Le réchauffement climatique va forcément limiter la production herbagère, donc laitière et fromagère. “En 2030-2035, on sera incapable de produire ce que l’on produit aujourd’hui. D’où l’intérêt d’anticiper et de s’adapter à ces évolutions. L’objectif est toujours de conserver la plus-value du produit qui permet de rémunérer honnêtement le producteur. Les résultats sont là et maintenant qu’est-ce qu’on en fait ?”, interroge Nicolas Lecatre