Ne jugeant pas la loi Égalim suffisante, les agriculteurs essayent de se faire entendre auprès des Grandes et Moyennes Surfaces.
Au GAEC des Tilleuls (Val-de-Roulans), la FDSEA a invité des représentants de grandes et moyennes surfaces du Doubs pour échanger sur les coûts de production qui augmentent dans les fermes et leur rémunération qui diminue.
La loi “Égalim” censée rémunérer les producteurs en fonction de leurs coûts de production n’a pas “ruisselé” jusque chez les producteurs. “Aujourd’hui un agriculteur comme moi se rémunère 700 euros par mois pour 70 heures de travail” se désole Stéphane Seguin, agriculteur à Mercey-le-Grand. Qui se remplit les poches ? Pas les grandes et moyennes surfaces à les écouter.
“Je suis attristé d’entendre dire que les grandes surfaces se “gavent” sur le dos des agriculteurs."
Le patron de Leclerc à Pontarlier résume assez bien le fossé qui s’est creusé entre ceux qui produisent et ceux qui vendent. “Je suis attristé d’entendre dire que les grandes surfaces se “gavent” sur le dos des agriculteurs car ce n’est pas le cas” expose David Hatton. Car lui, comme d’autres établissements, fait le job pour mettre en avant les produits locaux et les rémunérer au juste prix. Il travaille en direct avec 70 producteurs locaux sur le Haut-Doubs avec lesquels il a contractualisé un partenariat. “Avec ces producteurs locaux, je ne discute même pas le prix, j’achète ! À 99,99 % notre relation est excellente. On a demandé aux grandes surfaces d’augmenter les prix pour que cela ruisselle chez les paysans. Où est passée cette hausse car ce ne sont pas nos magasins qui l’ont prise ? Chez les transformateurs ? Je crois que la solution est dans le direct entre le producteur et nous” dit-il.
Sans doute juste comme analyse “mais elle ne permet pas d’écouler le volume” nuance Philippe Monnet, le président de la FDSEA du Doubs, qui, en partenariat avec les Jeunes agriculteurs du Doubs, a organisé mardi 2 mars au GAEC des Tilleuls situé au Val-de-Roulans une rencontre avec les représentants de la filière lait et viande et des représentants de grande et moyenne surface.
“Il faut arrêter ces promos sur les produits de production.”
Les Super U de Roche-lez-Beaupré, Thise, Rougemont, Baume-les-Dames, l’Intermarché de L’Isle-sur-le-Doubs, de Métro Besançon, Leclerc Houtaud avaient répondu à l’appel. Pour montrer “qu’ils ne sont pas là pour tondre la laine sur le dos des agriculteurs” comme l’image le responsable du U de Rougemont, les Super U rappellent qu’ils sont les premiers à avoir mis en valeur le “Bœuf comtois”, à donner 50 euros de plus par bête pour la viande hachée en 2020, ce qui représente un effort de 850 000 euros. Le représentant de Lidl - qui achète 4 400 bêtes par an - fait une proposition concrète : “Que la grande distribution arrête de faire des promotions sur les produits d’élevage. Quand je vois qu’un litre de lait peut être vendu 55 centimes en demi-écrémé (il est acheté 0,37) en magasin, c’est impossible de bien rémunérer le producteur. Il faut que la viande et le lait deviennent des secteurs protégés.”
Le patron de U à Baume-les-Dames a été transparent. Interrogé sur le prix du fromage à raclette label à 13,40 euros du kg dans ses rayons alors que le paysan vend 38 centimes le litre de lait, ce dernier explique qu’il prend 1,8 % de marge à la fin ! C’est peu. “On ne se gave pas sur le dos des agriculteurs. Et on ne rentabilise pas un magasin comme j’ai pu l’entendre sur 7 ans, mais 20 ans !” souligne Patrice Mathey.
Cette matinée, enrichissante, où le transformateur L’Ermitage était présent, a montré toute la difficulté d’un système entre des producteurs acculés par des coûts de production élevés et des magasins coincés par les marges. Quant au “tout local”, c’est impossible. N’importe qui ne peut pas débourser une pièce de bœuf label rouge à 30 ou 35 euros le kg.