Dans sa maison de Boveresse transformée en musée et en bar, Diane Tripet fait découvrir sa passion pour l’absinthe. Au comptoir, elle se livre aussi sur l’époque où elle était Nicolas, sa passion pour la chanson et pour la politique. Sans modération
L'Areuse, une rivière suisse qui prend sa source à Saint-Sulpice et se jette dans le lac de Neuchâtel, coule dans ses veines. Elle en a même fait un poème qu'elle a baptisé "Notre coin de pays". Diane Tripet, 69 ans, est une artiste, une musicienne. "Par instinct", insiste-t-elle. "J'ai toujours aimé la musique. J'ai pris des stages de chant avec Joëlle Gerber qui enseigne au Conservatoire de Neuchâtel. Elle m'a donné l'amour de la chanson française et le goût de composer." Et de reprendre les grands classiques de Brassens, Renaud.
Des plus grands, elle a repris les mots pour soulager ses maux. La musique fut pour elle une thérapie. Car avant de renaître en femme, Diane est née homme et a vécu entre 1954 et 2012 sous l'identité de Nicolas Tripet. Après une lourde opération, qui lui a offert le corps auquel elle s'était toujours identifiée, elle est ainsi devenue Diane. "J'étais mal dans ma peau d'homme", raconte-t-elle. "J'étais au bord du suicide, j'avais un mal-être en moi. J'ai reçu la foi en 2009 et j'ai eu des rêves, des songes qui m'ont indiqué que j'étais une femme. Le Bon Dieu m'a parlé. Et il m'a dit 'va et témoigne de ta foi...'" Avec la foi, Diane a retrouvé sa voie. Celle de la musique. Et fait apprécier sa voix. L'été dernier, elle a remplacé Pierre Agutte pour chanter dans une ferme proche de Malbuisson. Elle s'accompagne à la guitare sèche et revisite les standards de la chanson française. "Quand j'étais Nicolas, j'ai chanté au théâtre Blier de Pontarlier", se rappelle Diane. "J'aime bien chanter Trénet." Preuve en est, pas besoin de la pousser beaucoup pour l'entendre entonner l'hymne à la gaieté du grand Charles, "Y'a d'la joie". Par le passé, elle a aussi joué aux Absinthiades de Pontarlier. Un événement incontournable pour elle qui a la passion de la célèbre boisson anisée. Dans sa maison de Boveresse, elle s'est confectionné un magnifique musée qui lui est dédié. Un demi-millier de bouteilles, pleines ou entamées et venues du monde entier (Suisse, France, mais aussi Israël, Japon, États-Unis...), entretiennent sa légende. "C'est le maire de Boveresse de l'époque, Edmond Jean-Richard, qui m'a fait découvrir l'absinthe en 1988", se souvient Diane. "J'ai tout de suite aimé son goût anisé. Évidemment pour s'en procurer, ce n'était pas facile. Il fallait avoir de bonnes relations."
Avec Nicolas Giger, autre ancien maire de Boveresse, elle a participé à la création de la fête de l'Absinthe en 1998. "Je me considère comme une absinthologue", termine Diane. "Il y a bien des gynécologues, des psychologues. Pourquoi pas des absinthologues ? J'estime que l'on ne doit pas dire absintheur mais absinthologue..." En attendant que le débat soit tranché, Diane livre une ultime facette de son existence bien chargée : sa passion pour la politique. Membre du Parti socialiste du Val-de-Travers, elle défend, entre autres, la cause LGBT. Elle fait aussi partie du groupe Arc-en-Ciel qui soutient les chrétiens et les chrétiennes LGBT+. De gauche, LGBT+ et chrétienne, elle a sa propre idée sur le rapport de Jésus à la divinité et à l'Humanité : "Je suis sûr qu'il aurait été de gauche. Certainement même qu'il aurait été le premier des communistes...".